Transcription :
St André-le-Désert, le Jeudi 19 Aout 1915.
Mon cher papa,
Cette semaine, je crois pouvoir dire que j’ai été sage et Maurice aussi d’ailleurs. Maman et Tante nous l’ont plusieurs fois dit.
Nous avons reçu, il Dimanche et Mardi tes 2 dernières lettres. Nous t’en
remercions . Elles sont toujours très intéressantes. Je suis toujours
content de les lire. Tu n’est toujours pas parti ; j’en suis content ; tu
auras le temps de te battre, et de voir les Boches, et de les « canarder » ;
car j’espère que tu en démoliras quelques‘-uns, puisque tu est
très sibon tireur. La guerre va être si longue, que on se
demande quand l’on te reverra.,si
Nous ne nous amusons pas mal ici, mes enfin j‘ usque là nos vacances, je
te le dis franchement, n’ont pas valu celles des autres années : il nous manque
absolument des camarades ; si seulement André Terra venait, nous nous passerions bien
d'des
autres. Enfin Robert Grivaux viendra peut-être passer
quelques temps à Saint-André. L’oncle et la tante Denevers attendent la
réponse de sa mère pour en être sûre. S’ils viennent, Robert viendra
coucher ici, dans le pavillon, car il n’y aura point de place chez eux ; nous en
serons d’ailleurs d’autant
contents. Nous nous amuserons mieux s’il vient.
Jeudi dernier, nous avons été à la grande rivière. Ça ne mordait pourtant pas mal ;
mais j’ai eu la déveine à ma ligne ; ça n’
m’ a pas mordu à ma lig plus de la moitié qu’à Tante, Maurice
et Maman. Cette dernière a pêché un peu les gros à mi-fond ; elle en a pris deux.
Tante nous amènera peut-être ce soir à la pêche. Nous irons un de ces jours aux
grenouilles. Nous faisons peu de botanique ces temps ; nous lisons plutôt et surtout
nous jouons, soit à la maison, soit au croquet, à la petite guerre, etc… Le soir je
ne dépasse jamais mon heure qui est 9 heures ; au contraire je me couche toujours
avant ; Maurice a quelque fois dépassé 8 heures et demie, mais enfin il fait
tout ce qu’il peut aussi pour ne pas désobéir à son Papa.
Maintenant, il est temps que je te parle d’une question plus sérieuse et qui sûrement t’intéresse plus : le travail.
J’ai commencé Lundi 16 Aout. Maurice a voulu le en faire un peu aussi
Vendredi et Samedi, mais c’était plutôt comme passe-temps. Nous ne travaillons pas
le Dimanche, ni le Jeudi, car ce dernier jour nous t’écrivons et celà remplace
en gros
. Donc voici Maurice travaille un peu plus d’une demi-heure et moi
près d’une heure. Maurice fait alternativement du français et du calcul ;
e moi, voici comme j’ai divisé mon travail :
Revision : Devoir.
Lundi : Latin. Version latine.
Mardi : Allemand. Français.
Mercredi : Allemand. Allemand.
Vendredi : Latin. Thème latin.
Samedi : Latin. Calcul.
Comme revision je fais ce quecomme
tu me l’a espliqué à Bourges quantd
je revisais mes compositions. Maintenant je vais te demander si
tu trouves le programme que j’ai adapté pour mon travail. Si
non, tu me l’écriras ; je ferai comme tu me le diras.
Dansn Notre creux est habité ; il y a beaucoup plus de têtards
que et de tritons ou salamandres aquatiques que les autres années ;
puis il y a 2 ou 3 très grosses grenouilles, une énorme carpe qui a mordu déjà 2
fois à nos lignes quand nous pêchions des salamandres ; enfin Mauri
ce m’a dit qu’il avait vu l’autre jours un long serpent d’au
moins 1 mètre de long. Nous faisons flotter de petits bateaux sur l’eau
de notre creux, y compris le petit torpilleur ; l’autre jour, nous l’avons vu couler
à pic et il s’est enfoncé jusqu’à moitié dans la vase. Nous avons eu beaucoup de
peine à la ratrapper avec ton épuisette. C’est pourquoi il serait dangereux
de tomber dans ce creux.
Nous aidons maman et tante surtout en cassant
coupant du bois ; rassure-toi à ce sujet, nous ne nous servons pas de la
serpette, mais de la petite hachette. Nous coupons du bois moyen et des sarments ;
pour ces dernièresers
nous mettons les lunettes, de peur que les
morceaux nous sautent dans l’oeuiloeil
. Tu vous que nous sommes
prudents et tu peux être tranquilles.
Nous pensons toujours à toi ; je t’embrasse fort, pour Tante, Maman et moi.
Ton grand garçon :
André Déléage