Transcription :
Mardi 30 9bre 1915.
Ma chérie,
J’ai reçu hier ta longue lettre, et surtout ta gentille lettre. Je t’approuve fort de compléter ta garde-robe, car, ainsi que tu le dis, je serai heureux de te retrouver mignonne. Et si tu veux que je précise, voici : corsage de soie et jupe assortie qui te moulent bien. Tu sais, ce n’est pas pour demain, ce retour et ces tendres effusions ; l’affaire balkanique paraît devoir durer plus qu’on prévoyait, et on nous a annoncé que nous reprendrions l’offensive au printemps, et les «poilus» ajoutent : à Pâques ou à la Trinité ; mais je persiste à croire qu’il faut compter sur l’imprévu pour terminer la guerre ; et puis il y a la misère qui grandit, les listes de pertes qui s’allongent démesurément, la ruine économique qui menace, l’impossibilité de plus en plus évidente d’obtenir une décision militaire. Pourtant je dois ajouter que, à ne regarder qu’autour de nous, tout paraît indiquer une campagne encore longue. Mais maintenant
tu prendras plus facilement patience, et moi aussi d’ailleurs.
Reprenons la suite de mes petites commissions :
1° ne m’envoie plus de journaux, nous les trouvons ici chaque jour ;*
2° envoie-moi une boite de plumes Flament N°2 ; j’écris par trop mal avec les plumes dures.
N°3 une pile semblable à la dernière, qui est excellente.
Et voilà.
C’est aujourd’hui la St André, autrefois la fête de mon père, maintenant celle de mon fils ; dis-lui qu’en lui souhaitant une bonne fête, je l’embrasse avec toute ma affection, et souhaite qu’il reste bien portant et gentil avec toi ; pour le reste, je suis tranquille.
Mon apprentissage continue sans trop de difficultés, je fais q ;q
quelques] progrès dans l’art de la paperasses méticuleuse. Je trouve à la
popotte de meilleurs camarades qu’à la 23ème Cie, plus
cultivés, plus aimables, avec lesquels on peut causer et plaisanter ; on ne s’en
prive pas ; chaque soir, jusque vers 10 heures, on tape le carton.
Mon sergent-major est M. Vandoux, epicier à Bourges (angle de la rue d’Auron et de la rue
des Armuriers), c’est un aimable garçon.
En somme ns faisons bon ménage ; ns disposons d’un bon cuisinier, qui sait accommoder le bœuf quotidien de façon variée. Même dans les marches, je n’aurai plus à porter mon sac, et quant à mon petit matériel je puis le loger dans les caisses de l’Etat-major dont j ‘ai les clés et la responsabilité.
Tout cela, et bien d’autres détails que tu connaîtras peu à peu, pour te montrer que je ne suis plus aucunement à plaindre.
Mais ne vois-je pas, de ce chef, baisser un peu dans ta tendresse ? tâte-toi bien avant de me répondre. J’attends.
Sur ce, je t’embrasse longuement dans le cou, après t’avoir chargé de toutes mes tendresses à mes petits.
Jean
ma honte
ma honte
ma h
ma honte et
ma
ma hon