Transcription :
11.8.16.
Amie chère,
Je n’ai presque rien à te dire, rien qu’un mot sur l’expression que tu as prise dans le groupe.
Je ne te l’avais jamais vue, et elle est indéfinissable ; tantôt j’y vois le visage
d’une jeune fille qui s’efforcerait à être grave, tantôt celui d’une femme qui
chercherait un demi-sourire. Et puis tes yeux regardent ! ils ne sont pas du tout
jeune fille, tes yeux ! L’arrangement des cheveux ..
et du corsage, lée
port de la tête, enfin l’ensemble rappelle
les portraits de la « Femme de trente ans » tracés par Balzac. C’est curieux comme
ta physionomie s’affirme avec les années.
Tellement, que j’en ai été surpris. Depuis plus d’un an, je ne te vois guère que sous tes traits des vingt ans ; peu à peu, à regarder ton ancienne image, c’est celle-ci qui avait, dans mes yeux, pris la place de l’image actuelle. Et voilà
qu’aujourd’hui je te « découvre », littéralement. D’ailleurs, la première surprise passée, je t’aime mieux ainsi : tu es plus femme et plus près de moi. Avant de « poser » ., tu avais fait un brin de toilette ; était-ce à mon intention ? Si oui, je t’en sais gré sincèrement.
La morale de cela, tu l’aperçois : dès ta rentrée à Bourges, il faudra t’adresser à un bon photographe afin que j’aie de toi un portrait ressemblant. D’ailleurs, tu es à un moment de la vie où les traits sont particulièrement nets et intéressants. C’est dit ?
A bientôt ; j’attends toujours ta réponse à ma lettre du 6 courant ; je n’avais rien au courrier d’aujourd’hui.
Un long baiser.
Jean