Pierre Ferrier et Le Creusot
Qui était Pierre Ferrier ?
Pierre Ferrier et Le Creusot
Qui était Pierre Ferrier ?
Pierre Ferrier est né le 6 septembre 1872, en Alsace annexée, à Saverne, ville natale de sa mère.
Il a également des racines en Saône-et-Loire : sa famille paternelle est originaire du Miroir (en Bresse).
Il vit à Saverne jusqu’en 1881. On le retrouve en Saône-et-Loire au moment de son service militaire.
Sa fiche matricule militaire
Employé de bureau, il travaille à la Trésorerie générale et à l’Economat des Hospices de Mâcon avant d’être nommé, en 1895, employé de l’état-civil à la Ville de Mâcon.
En 1900, il devient secrétaire en chef de la mairie de Mâcon, puis secrétaire en chef de la mairie du Creusot en 1911 ; il y exerce jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale.
Il démissionne en 1919 et part pour Audun-le-Tiche (Moselle), où il devient secrétaire de la Direction de la Société minière des Terres Rouges.
Il y termine sa carrière.
Au moment de la retraite, il part pour Saverne, où il reste jusqu’en 1940.
Il termine sa vie à Nancy, où il décède le 27 avril 1945.
Pierre Ferrier et sa femme, Louise Mottard, dans les années 1930.
Debout derrière eux, leur fils Marc et leur fille Yvonne. C’est sans doute leur fils Albert qui prend la photographie.
(Collection Famille Ferrier)
Un homme cultivé
C’est un homme cultivé, qui a été membre associé de l’Académie de Mâcon de 1916 à 1935.
Si l’on connaît, au Creusot, le fascicule qu’il avait publié en 1919, « Ephémérides municipales, 1793-1853 », on sait moins qu’il est l’auteur d’un document intitulé « A tous les Français, aimons l’Alsace-Lorraine ».
Publiée en 1917 par l’Union amicale et mutuelle des Alsaciens-Lorrains du Creusot, cette brochure, à connotation patriotique, visait à resserrer les liens entre Français et Alsaciens-Lorrains.
Il a également présenté, à la séance du 7 février 1923 de l’Académie de Mâcon, une communication sur les Français d’Alsace-Lorraine, leurs années d’occupation allemande, son expérience personnelle dans cette région où il est retourné après 1918 : « Echos de Lorraine », a été publié dans le volume de 1922-1923 des Annales de l’Académie de Mâcon.
Sur Gallica.fr p. 286 à 293
Enfin, dans les années 1930, avec son fils Marc, pharmacien, il a écrit un ouvrage sur les champignons « Les Champignons que chacun doit connaître ».
Chroniqueur du Creusot 1914-1918
Les quatre livrets qui forment cette chronique du Creusot pendant la Première Guerre mondiale ont été rédigés à chaque fois à la fin de la période concernée, sans doute à partir de notes prises par Ferrier et consciencieusement classées.
Il semble que le secrétaire de la mairie du Creusot ait répondu à une circulaire préfectorale, « dont il ne trouve plus trace ». Mais il en avait peut-être été informé par le sous-préfet, qui était venu au Creusot – comme dans d’autres communes de la circonscription – au tout début de la guerre. Ou bien s’agissait-il de la demande du Ministère de l’Instruction publique, citée dans les Annales de l’Académie de Mâcon, sur des statistiques économiques pendant la période de la guerre.
Toujours est-il que les Archives départementales de Saône-et-Loire, en la personne de Léonce Lex, archiviste départemental depuis 1885, conservateur des archives et de la bibliothèque de Mâcon, et président de l’Académie de Mâcon, ont jugé utile de conserver dans leurs fonds les textes écrits par Pierre Ferrier.
Si ce texte répond à une demande de rapport administratif, il ressemble plutôt à un texte littéraire.
On y trouve, comme Pierre Ferrier l’écrit à Léonce Lex, quelques petits faits locaux, quelques impressions personnelles.
Ces descriptions détaillées de la situation du Creusot sont accompagnées de leçons de morale, d’invitations au patriotisme, d’allusions à l’Alsace-Lorraine, de critiques et d’éloges de la population creusotine de ces années de guerre.
Les envolées lyriques sont nombreuses ; Ferrier utilise le registre pathétique, propre à susciter l’émotion du lecteur. Il emploie pour cela de nombreuses figures de style, en particulier des anaphores, qui donnent, par leur effet d’accumulation, un rythme au texte, des gradations (énumération de termes ordonnés selon une progression ascendante), des apostrophes, des phrases interrogatives répétées, des oppositions…
Pierre Ferrier aborde dans ces quatre livrets des sujets variés (alimentation, pétrole, main d'oeuvre étrangère...) comme en témoignent les extraits ci-dessous :
Donner, donner, donner, telle était la devise de chacun quand on pressentait que par ailleurs les soldats allaient tant donner
p.1 du livret 1 (1914-1915). "Les 30, 31 juillet, les bruits de guerre montent crescendo...Le tambour bat, le tocsin sonne. L'heure du sacrifice, l'heure des larmes est venue."
p.10 du livret 1 (1914-1915). "Donner, donner, donner, telle était la devise de chacun..."
p.12 du livret 1 (1914-1915). "Hélas ! il fallut déchanter et la prise définitive de la vieille cité alsacienne, si française de coeur..."
p.18 du livret 1 (1914-1915). "Elles ne pouvaient admettre,...qu'une femme fût assez dépravée pour s'oublier pendant que le mari était peut-être couché, sanglant..."
La sortie des ouvriers devient un spectacle peu banal ; les costumes les plus variés, les parlers les plus divers donnent l'impression d'une Tour de Babel, d'une cité cosmopolite.
p.2 du livret 2 (1915-1916). "La sortie des ouvriers devient un spectacle peu banal...les parlers les plus divers donnent l'impression d'une Tour de Babel..."
p.7 du livret 2 (1915-1916). "je veux dire à la veuve de la guerre, un culte sans réserve, un culte fait de respect profond, de respect plein d'affection..."
p.8 du livret 2 (1915-1916). "Ah ! La guerre est bien la grande épreuve qui donne à chacun sa valeur réelle."
p.31 du livret 2 (1915-1916). "PETROLE – Nous avons eu aussi, en janvier 1916, une crise du pétrole et de l'essence pour moteur..."
l'on entrevoit l'effroyable réalité que représente la guerre d'usure qui nous est imposée, pour la première fois peut-être l'on n'ose plus fixer une durée à la Grande Guerre.
p.1 du livret 3 (1916-1917). "l'Amérique à son tour entre dans l'arène. La Victoire reste donc possible ; elle reste donc certaine si la France veut tenir."
p.11 du livret 3 (1916-1917). "Les Chinois se montrent en général doux, polis, propres, intelligents."
le 11 novembre 1918, lorsque la signature de l'armistice fut connue, la rue fut envahie ; on s'embrassait ; on dansait ; on pleurait. C'était donc fini ! La France était sauvée et l'on ne tuerait plus.
p.5 du livret 4 (1916-1917). "ETRANGERS – Au 29 Mars 1918, nous avions au Creusot 2 770 étrangers dont 1 700 Chinois, 240 Kabyles, 120 Portugais, 300 Espagnols..."
p.5 du livret 4 (1916-1917). "le 11 novembre 1918...."