Contourner la censure
" Mon messager m'attend, il me faut clore "
Dans les courriers transmis par la poste militaire, les soldats ne peuvent rien dire de leurs conditions de vie effroyables dans les tranchées ou du lieu où ils se trouvent, car le contrôle postal et la censure veillent...
Pour décrire sa situation "vraie", Jean Déléage fait appel aux permissionnaires. A chaque occasion et mouvement de secteur important de son régiment, il transmet à son épouse une lettre très détaillée contenant des informations répréhensibles aux yeux de la censure : lieu où il se trouve, pérégrinations antérieures, état moral des troupes, analyse stratégique de la situation, détails de son installation, étapes ultérieures supposées….
Il inaugure ce procédé à son arrivée en Artois le 16 juillet 1915 en confiant à « un sergent, renvoyé du front pour aller travailler chez Vermorel à Villefranche-sur-Saône » sa lettre que ce dernier doit envoyer par la poste civile à Chalon-sur-Saône.
Je puis donc t'écrire en toute sécurité et te renseigner avec plus de précision
lorsqu’on ordonne une attaque, beaucoup de soldats ne sortent pas des tranchées, de sorte qu’on en fait passer en conseil de guerre et que ceux qui attaquent sont fauchés en raison de leur petit nombre.
D’une façon plus générale, le régiment se cléricalise, et les membres de l’enseignement sont mal vus parmi les officiers ; il y a parmi ces derniers pas mal d’incapables et de je m’enfoutistes.
Dans la nuit du 18 au 19 courant, nous allons prendre la tranchée entre Chaulnes et Chilly ; un croquis ci-joint t’indiquera les emplacements