Avis de tempête !
Rédigé à deux voix, le rapport présenté ici nous renseigne plus précisément sur les inondations de la Loire des 24, 25 et 26 septembre 1866 survenues en Saône-et-Loire et leurs conséquences.
L'original de ce document peut être consulté sous la cote 3 S CDC 17 parmi les fonds relatifs à la navigation intérieure (fleuves, lacs, canaux), classés dans la sous-série 3 S, et plus particulièrement dans les dossiers relatifs au Canal du Centre (CDC).
Premier à s’exprimer, l’ingénieur ordinaire du Canal du Centre revient sur le déroulé des événements. Il parle de tempête et même de cataclysme, de vagues énormes sur les étangs, de peupliers brisés, d’acacias déracinés, d’une pluie diluvienne, de routes ravinées et de glissements de terre, d’un courant furieux à travers les établissements des mines à Montceau ou encore d’une maison éclusière cernée par les eaux à Ciry. Il décrit les manœuvres engagées en urgence dont la périlleuse tentative de sauvetage de la digue de Digoin menaçant le quartier dit de la Dombe situé dans la partie basse de la ville.
Son supérieur hiérarchique, l’ingénieur en chef, absent lors des faits pour raisons familiales, poursuit. S'il apporte d'emblée quelques nuances à l'exposé inaugural, qu'il juge un peu emporté mais bien excusable au regard des circonstances, celui-ci exprime également sa reconnaissance envers son second «debout 60 heures, courant le jour et la nuit, du point de partage à Digoin, des étangs aux digues, circulant sur des chaussées envahies par les eaux, encourageant et dirigeant les travailleurs…». Trois jours de reconnaissance sur le terrain lui permettent de dresser ce bilan : les avaries sont nombreuses mais limitées aux aménagements des cours d’eau (biefs, barrages, digues…) et au versant Océan, aucune dégradation n’est à signaler sur les ouvrages d’art. Des préconisations suivent.
Morceaux choisis - Extraits du récit concernant la tentative de sauvetage de la digue de Digoin.
À Digoin, «la Loire atteint 6m30 au-dessus de l’étiage soit 0m60 à 0m65 au-dessous du niveau de l’inondation de 1846. […] Nous avions peu d’espoir de conjurer cette rupture, cependant puisque nous avions sous la main tant de gens de bonne volonté, nous l’avons tenté […] Au bout d’une heure environ de travail, nous avions obtenu sinon un étanchement, au moins un certain arrêt dans l’infiltration de nos 20 mètres mais plus loin, des crevasses plus inquiétantes se produisaient […] Nous avons fait cesser le travail ; ce dont nous nous sommes vivement applaudi une demi- heure après en voyant la digue se rompre brusquement sur 20 mètres de longueur, entraîner les peupliers abattus comme des brins de paille et livrer passage au torrent furieux d’un nouveau bras de la Loire qui n’avait pas moins de 1 m 50 à 2 m de chute.»