Une pochette brodée pour son anniversaire
En lien avec l'exposition "Souvenirs" Traces d'histoires de femmes déportées à Cluny du 18 au 23 octobre, nous avons choisi de vous présenter un objet ramené de l'enfer des camps nazis par Suzanne Burdin, clunisoise arrêtée le 14 février 1944 et déportée à Ravensbrück et Mauthausen.
Suzanne Burdin, raconte dans son témoignage, rédigé en 1983 (cote : J 651) les circonstances de la remise de cette pochette brodée et plus largement l'importance pour ces femmes que revêt la solidarité, les relations humaines, les marques d'affection pour survivre dans les camps, pour lutter contre la barbarie et la deshumanisation.
A Ravensbrück, les Clunisoises (à l'exception de Georgette Colin) étaient regroupées au Block 32 avec des Belges et des Hollandaises. Le Block 32 était celui des NN (Nacht und Nebel), celles qui devaient disparaître sans laisser de trace. Ce qui aurait dû être leur perte leur a sans doute sauvé la vie, le fait d'être regroupées leur permettant de se soutenir mutuellement.
Dans ce Block, régnait une bonne entente, ce qui n'était pas toujours le cas, les déportées s'organisaient pour créer un semblant de vie normale. Avec le peu de moyens dont elles disposaient, elles arrivaient à souhaiter fêtes et anniversaires. C'est ainsi que Suzanne a reçu en cadeau, pour son anniversaire, le 11 janvier, une pochette brodée à ses initiales. Elle avait, elle même commencé à en broder une.
"Au début, celles qui travaillaient avaient droit, en supplément, à une pomme de terre cuite à l'eau, mais cela n'a pas duré longtemps et, en fin de semaine avait lieu une distribution d'un carré de margarine, une cuillerée de confiture et une tranche de saucisson, ersatz bien sur. Avec cela, nous arrivions à confectionner une espèce de "gâteau" pour les jours de fête ou anniversaire de camarades en mettant tout en commun, mais cela se passait tout au début..."
Suzanne Burdin nous a quittée en 2011, mais par la volonté de ses enfants et son engagement dans l'oeuvre de transmission de la mémoire, elle nous laisse en partage son témoignage écrit original, et d'émouvants objets dont sa petite pochette et documents qu'elle a ramenés de se 14 mois de déportation - notamment ses carnets de recettes rédigés dans les camps pour tenir (cote : 84 J, dépôt du Centre de documentation Résistance et Déportation de Saône-et-Loire) - sont aujourd'hui conservés aux Archives départementales.